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L'Etat trop lent pour mener sa politique de croissance

La lenteur des investissements publics entrave les perspectives de redressement économique pour cette année. A moins de 4 mois de la fin de l'exercice fiscal, seuls 17 % des investissements de l'Etat sont réalisés dans le cadre de l'exécution du budget national. (1) Ce retard dans la mise en oeuvre des programmes et projets de développement met à mal les objectifs de croissance du gouvernement. Avec autant de retard dans les investissements publics, les prévisions de 7,8% de taux de croissance, qui annonçaient Haïti comme l'une des économies les plus dynamiques de la région pour l'année (2), ne tiennent plus la route.



Les autorités financières de même que les experts du FMI révisent leurs projections à la  baisse, ne tablant plus que sur une hausse annuelle de moins de 6% du PIB pour 2012 (contre 5,6 en 2011). Ces dépenses devaient contribuer grandement à tirer la croissance. Mais la machine de l'administration publique n'aura pas fonctionné au rythme des prévisions officielles. « Malgré les 2,7 milliards de gourdes d'allègement de la dette du FMI pour la reconstruction des bâtiments publics, aucun  chantier n'a été mis en oeuvre », a déploré Jocelerme Privert, président de la commission Finances et Budget du Sénat.

Selon le sénateur, la conduite de la politique budgétaire a été biaisée, dès le départ, par le retard pris par l'Exécutif pour déposer le projet de la loi de finances 2011-2012 au Parlement. Évalué à environ 121 milliards de gourdes, le budget n'a été déposé qu'en janvier, soit avec 8 mois de retard. La lenteur d'exécution des projets gouvernementaux a été exacerbée par la transition gouvernementale (de février à mai de cette année).

Pour sa part, le gouvernement indexe surtout les procédures de passation de marchés. Selon les plus hautes autorités de l'Etat, elles sont trop lentes, trop complexes pour le contexte d'urgence actuel du pays. « La loi sur la passation des marchés a été votée par le Parlement, et en ce sens, les législateurs ont leur part de responsabilité dans ce dossier », a-t-il expliqué. La commission Finances et Budget du Grand Corps envisage alors de s'asseoir, dans les prochains jours, avec les responsables de la Commission nationale de marchés publics (CNMP) afin de relever « les goulots d'étranglement » posés par ces procédures.

Le président de la commission Finances et Budget met aussi en avant le fameux problème de capacité d'absorption de l'administration publique. Le FMI est, lui, conscient du problème. Satisfait des performances du pays en matière de recettes fiscales et de baisse du taux d'inflation, une délégation de l'institution s'est récemment engagée à soutenir  les autorités dans l'amélioration de la capacité d'exécution du programme d'investissement public. « Les institutions internationales sont unanimes à reconnaître que si Haïti a des problèmes de capacité d'absorption, les procédures sont en grande partie responsables des retards pris », témoignait déjà Garry Conille en janvier dernier.

Les efforts de redressement économique sont, par ailleurs, menacés par l'éventualité d'une nouvelle récession mondiale. Avec le ralentissement de la croissance aux Etats-Unis et dans la zone euro, un retard dans les décaissements de l'aide au développement promis au pays est redouté par les représentants de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI) pour cette année. Les promesses de coopération externe (dont 46 milliards de gourdes pour les dépenses d'investissement) ne sont pas certaines d'être tenues et peuvent comme l'année dernière aggraver le retard dans la mise en application du programme d'investissement public.

Le MEF a réitéré au Sénat son engagement de respecter pour l'exercice fiscal 2012-2013 le délai constitutionnel de dépôt du projet de loi de finances du 30 juin de l'année en cours. Une telle démarche permettrait enfin à l'Etat de cesser la reconduction du budget de 2009 et de planifier des programmes et projets plus adaptés au contexte de la reconstruction nationale.  



(1)Données du Ministère de l'Economie et des Finances (MEF).
(2) Prévisions de la Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC)

 

Carl-Henry CADET Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.