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Lettre de M. Jean Claude Fignolé, Maire élu des Abricots à Me Thierry Mayard Paul

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UNE CONCEPTION ANTIDÉMOCRATIQUE DE L’ADMINISTRATION PUBLIQUE

Changement de statut des Maires en celui d'Agents Exécutifs Intérimaires

Lettre de M. Jean Claude Fignolé, Maire élu des Abricots et Président de l'Association des Maires de la Grand Anse (AMAGA) à Me Thierry Mayard Paul

Monsieur le Ministre Thierry Mayard Paul

En ses bureaux

 Monsieur le Ministre,


L'ASSOCIATION DES MAIRES DE LA GRAND ANSE  (AMAGA) a appris par voie de presse le changement de statut des Maires en celui d'Agents Exécutifs Intérimaires. Compte tenu des enjeux administratifs et économiques lies a la décentralisation, AMAGA déplore qu'une simple note ayant valeur de circulaire ait décidé souverainement de mettre fin a un processus que le candidat Michel Martelly nous avait promis d'encourager et dont le Président Martelly, dans les premiers mois de son mandat, n'avait cesse de se réclamer.


L'AMAGA, face a ce qu'elle considère comme un dangereux précédent de sans -gêne administratif courant vers la dérive institutionnelle, s'oblige a produire les remarques suivantes.

- Ministre d'un gouvernement démissionnaire, reconduit certes mais non encore réinvesti par voie de prestation de serment, vous auriez pu vous épargner la peine de mettre fin au mandat des maires par une simple circulaire alors qu'il s'agit d'un fondamental de la FONCTION PUBLIQUE relevant, au pis d'un décret, au mieux, d'une loi.

-Vous avez, d'un revers d'écriture, aboli la fonction de maire en la remplaçant par celle d'Agents Exécutifs Intérimaires. Il s'agit la d'un acte arbitraire de révocation par suppression de postes. Or il est un principe clef en droit administratif dont vous avez oublie de vous prévaloir pour éviter une méprise: L'autorité de révocation doit avoir été, au préalable, celle de nomination. Vous êtes vous rappelé, Monsieur le Ministre, que votre prédécesseur a aucun moment, avait eu pouvoir de nommer des maires après qu'ils ont été élus? La vérité est que les maires ont été investis d'un mandat par des électeurs qui seuls ont autorité de les renvoyer en élisant d'autres maires a leur place. Sauf dans les cas spéciaux prévus par la Constitution. Ils n'ont donc personne au dessus d'eux dans la hiérarchie de la fonction publique pour décider de leur sort sinon les électeurs eux -mêmes. Votre décision, Monsieur le Ministre, s 'apparente a une usurpation d'autorité assimilable a un abus de pouvoir.

-Au surplus, avez-vous pensé au code ou a l'article du budget national  qui réfère a la fonction AGENT EXECUTIF INTERIMAIRE ? Le 110 ou le 112? Ou aucun des deux? Cette fonction n'ayant aucun référent budgétaire qui justifierait d'une obligation d'émolument, elle ne peut être qu'une fiction qui n'a point l'excuse d'être justifiable par une loi votée par un quelconque parlement qui l'aurait ainsi créée.

- Monsieur le Ministre, vous êtes vous souvenu que la Constitution en son article 63 prévoit les conditions d'élection des maires et qu'en celui 66 elle consacre l'autonomie administrative et financière des communes? Faute de lois d'application précisant et renforçant cette autonomie, vous auriez du vous en tenir a une interprétation stricto sensu de la Charte Fondamentale pour préserver des droits acquis. Vous auriez compris alors qu'en aucune façon vous n'auriez du placer le POUVOIR MUNICIPAL sous l'autorité d'employés subalternes de votre Ministère dont d'ailleurs le rôle et la fonction ne sont pas encore clairement définis. J'en veux pour preuve que certains oscillent entre l'autoritarisme des anciens préfets et les délices de leur vocation première : la délation.

L'AMAGA, œuvrant pour le renforcement de la démocratie par celui du processus de décentralisation, souhaite, Monsieur le Ministre, que vous vous arrêtiez a ces remarques brèves et que vous preniez a cœur de rentrer la circulaire incriminée. Et surtout que vous proposiez au nouveau gouvernement d'organiser au plus vite, d'ici a deux mois, les élections municipales aux fins de renouveler le mandat des Maires. S'ils sont encore à leur place, la faute est a qui? J'ose avancer, il faut vous en souvenir, que leurs interventions à travers tout le pays lors de différentes catastrophes, cyclones, séisme, épidémie de cholera, la conscience collective qu'ils ont développée de leurs responsabilités envers leurs administrés, leur sens du devoir et leur dévouement, ne les prédispose point a mériter ,quand vous rabaissez leur fonction tout en feignant de les garder a leur poste, "Ni cet excès d'honneur ni cette indignité".

Je vous prie, Monsieur le Ministre, d'agréer mes salutations.
 
Pour l'AMAGA réunie en assemblée extraordinaire aux Abricots le 15 mai 2012
 
Jean Claude Fignolé
Maire élu des Abricots.
Président de l'Association des Maires
de la Grand Anse
 
C/C Fédération Nationale des Maires

Photo:© Jacques Leenhardt