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L'insécurité, ce mal incurable

insecuriteIl n'y a pas un mois que l'Administration Martelly/Lamothe se vantait d'avoir réduit le climat d'insécurité et le phénomène du kidnapping à son niveau le plus bas depuis plus décennie. Tellement fière de cette "performance" qui, d'après elle, allait faire revenir les touristes au pays et faire porter dignement à Haiti le slogan "a country open for business" (un pays ouvert à l'investissement, surtout étranger) que l'équipe Tet Kale répétait à envie et jusque dans les meetings internationaux, y compris aux Nations Unies (discours officiel de Laurent Lamothe à la dernière Assemblée générale) que pour la première fois depuis des lustres la vie reprenait dans la cité, notamment la vie nocturne et que la peur et l'inquiétude qui tenaillaient les esprits par crainte de se voir tuer en pleine rue ou enlever se transforment peu à peu en un espoir d'un avenir radieux pour le pays.

En fait, Martelly et Lamothe avaient tort de crier victoire trop vite et en vérité, personne n'avait vraiment compris pourquoi la machine de l'insécurité avait comme par magie cessé de faucher des vies au rythme qui était le sien. L'effectif de la police n'avait pas augmenté, les patrouilles de police ne se sont pas intensifiées dans les rues et la situation générale d'existence des haïtiens n'avait non plus pas changé (qui aurait pour effet de réduire les pressions sociales et économiques, donc diminuer le banditisme). Les opposants au régime (Moyse Jn Charles, en particulier) attribuaient la baisse du climat de l'insécurité à l'arrestation de certains "proches du pouvoir", notamment le gang de Clifford Brandt mais, en réalité, il n'en était rien de tout cela et l'on voit bien que le ouf de soulagement qu'avaient tiré les haïtiens ces derniers mois ne pouvait pas être mis à l'actif du pouvoir contrairement à la propagande.

La peur s'installe à nouveau dans le pays et particulièrement dans la région métropolitaine de Port-au-Prince et les cas d'assassinat, d'enlèvement et d'attaque à mains armées constituent depuis trois à quatre semaines environ le lot de chagrin quotidien des habitants. La dernière victime en date est le président de l'Union Évangélique Baptiste de PAP, le pasteur Serlus Simon enlevé avant hier au soir (vendredi) et assassiné le lendemain, du moins retrouvé sans vie sur un terrain abandonné à Pernier 40, au Nord'est de Port-au-Prince. Les ravisseurs avaient grièvement blessé sa femme au moment de partir avec la victime, agée de 59 ans et père de trois enfants pour laquelle une rançon de 100.000 dollars Us avait été réclamée; ils n'ont pas eu le temps de la toucher.

A Carrefour (Sud de PaP), en direct à l'émission Intersection, sur Caraibes FM, Jeudi dernier, l'assassinat d'un jeune universitaire de 21 ans était rapporté. Il revenait de la banque et les bandits avaient blessé tres grièvement deux autres personnes qui se trouvaient sur le lieu du drame. La police était sans réaction ou, selon la formule consacrée, était arrivée en retard; tout comme à Nazon, une semaine plus tôt pour l'assassinat, dans un autobus de transport en commun, du professeur d'université de 83 ans, Lucien Jean Roland. Il revenait lui aussi de la banque avec son maigre salaire de professeur fraîchement converti en cash. Ses funérailles émouvantes ont eu lieu vendredi dernier au Sacre-Coeur de Turgeau en présence de professeurs, d'étudiants, de proches et aussi de plusieurs dirigeants politiques.

Un autre professeur d'université était tombé une quinzaine avant et dans les mêmes conditions et la liste est loin d'être exhaustive. Une situation qui incite à "l'exil", a commenté un collègue professeur (INAGHEI) du défunt Roland Jn Lucien; "personne ne souhaite perdre sa vie dans des conditions aussi inacceptables", avance t-il. Se lever le matin, sortir de chez soi pour y revenir sain et sauf le soir devient un véritable luxe dans un pays où les bandits, sans état d'âme, ne font aucun cadeau; et surtout qu'on approche de la fatidique fin d'année, généralement faucheuse de vies car, les malfrats sont en quête de butin pour se la couler douce dans les fêtes.

Jean Monard Metellus
Source: RTVC