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RNDDH: Rapport sur les évènements pays Lock de Février 2019 - Quarante (40) personnes au moins ont été tuées dont dix-sept (17) de balles à la tête
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- Publié le vendredi 22 mars 2019 00:17
Tout Haiti présente le rapport détaillé du Réseau National de Défense des Droits Humains RNDDH sur les évènements du 7 au 17 février 2019 qui avaient ébranlé le régime Tèt Kale 2.0 du président inculpé Jovenel Moise.
RNDDH 19 Mars 2019 - Dans un contexte socioéconomique préoccupant, caractérisé par la cherté de la vie, la dévaluation de la gourde, une corruption étatique chaque jour confirmée et une pauvreté extrême, du 7 au 17 février 2019, des manifestations de rue renforcées par un mouvement de protestation intitulé Opération de verrouillage, ont paralysé toutes les activités du pays. Les manifestants ont gagné les rues pour exiger la tenue du procès PetroCaribe et le départ immédiat du président de la République, Jovenel Moise, en raison de son incapacité à diriger le pays dans le respect des droits humains et à influencer positivement les conditions de vie précaires de la population.
Le bilan de ces événements est lourd : quarante (40) personnes au moins ont été tuées dont dix-sept (17) de balles à la tête et quatre-vingt-deux (82) autres ont été blessées parmi elles, vingt (20) agents de la PNH. De plus, douze (12) stations d’essence, six (6) institutions bancaires, vingt-trois (23) autres entreprises commerciales privées, deux (2) établissements scolaires, un (1) hôpital, une (1) université et sept (7) maisons privées ont été vandalisées et/ou incendiées.
Les impacts de ce mouvement ont été énormes sur les vies familiale, scolaire et universitaire, sur le marché national de produits alimentaires ainsi que sur les secteurs de la santé et du tourisme. Et, la majorité de la population haïtienne, obligée de vivre au jour le jour de petites activités génératrices de revenus, a été rudement frappée.
Le rapport suivant présente un bilan détaillé de ces événements, attire l’attention sur des faits parallèles qui se sont produits dans le pays au cours de la même période et adresse des recommandations aux autorités législatives et exécutives.
I- Introduction
Quelques jours avant le 7 février 2019, la population haïtienne a été invitée à investir les rues en cette date, pour dénoncer la cherté de vie et la mauvaise gouvernance, réclamer la tenue du procès relatif à la dilapidation des fonds PétroCaribe et exiger le départ immédiat du président de la République.
Ce qui devait ne constituer qu’une manifestation d’un jour, s’est mué en un mouvement de paralysie générale de toutes les activités socioéconomiques du pays, du 7 au 17 février 2019. Ce mouvement – le troisième du genre depuis l’accession au pouvoir du président Jovenel Moïse, le premier ayant eu lieu du 6 au 8 juillet 2018 et le second, du 18 au 21 novembre 2018 – a été dénommé « Opération de verrouillage ».
Caractérisé par des manifestations spontanées et sporadiques, l’entreposage de barricades enflammées sur la voie publique, le pillage et/ou l’incendie d’entreprises commerciales et surtout l’alimentation d’une psychose de peur, par l’envoi de messages incitant à la violence et menaçant quiconque s’aventurerait dans les rues, ce mouvement s’est soldé par plusieurs morts et de nombreux blessés.
Le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) et ses structures régionales ont mené une enquête en vue de dresser le bilan des événements survenus du 7 au 17 février 2019. Ils se proposent de partager avec tous ceux que la question intéresse, le rapport y relatif.
II- Méthodologie
Plusieurs équipes du RNDDH et de ses structures régionales ont été dépêchées sur le terrain du 15 février au 8 mars 2019. Elles se sont rendues dans des institutions étatiques pour s’entretenir avec les autorités concernées, s’enquérir formellement de la situation et récupérer, lorsque cela est possible, des données compilées par ces autorités, relatives aux faits survenus pendant les événements. De plus, des entreprises endommagées ont été visitées et des parents de victimes ainsi que des victimes ont été rencontrés. En ce sens, le RNDDH et ses structures se sont entretenus avec :
- Des autorités policières et judiciaires
- Des autorités municipales
- Des responsables d’hôpitaux et de centres de santé
- Des propriétaires et des employés d’entreprises commerciales
- Des parents de victimes
- Des victimes
III- Contexte politique et socioéconomique du pays
Quelques mois après son accession au pouvoir, le président Jovenel Moïse est décrié par l’opposition politique qui remet en question les résultats des dernières joutes électorales desquelles il est issu, dénonce une politique gouvernementale basée sur le favoritisme de la bourgeoisie (ici pris dans le sens des nantis économiques), et accuse le chef de l’Etat d’alimenter l’espoir du peuple en faisant des promesses qu’il ne compte pas tenir tout en dilapidant, dans un programme opaque dénommé « Caravane du changement » les deniers publics. Sur la base de tous ces faits, il lui est demandé de remettre les rênes du pouvoir.
Son implication présumée dans la dilapidation des fonds Petro-Caribe, mise en exergue par les rapports sénatoriaux portant sur le sujet, corroborés et complétés par le rapport partiel de la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif (CSCCA), fournit à l’opposition politique une raison supplémentaire d’exiger son départ du pouvoir.
Parallèlement, une rapide évaluation des conditions de vie de la population prouve qu’effectivement la situation du pays est très préoccupante. En effet, de janvier à décembre 2018, sept cent quatre‑vingt‑treize (793) personnes ont été victimes de mort violente soit plus de deux (2) personnes par jour. Six cent quarante-quatre (644) d’entre elles ont été tuées par balles[1], ce qui prouve que le pays patauge dans une insécurité grandissante à un point tel qu’elle est considérée comme étant à son plus haut niveau. Des luttes hégémoniques sont enregistrées partout dans les quartiers populeux où des chefs de gang armés s’érigent en suzerains. Les prix des produits de première nécessité grimpent chaque jour et la population a du mal à faire face à ses responsabilités. Les droits sociaux et économiques du peuple haïtien sont journellement bafoués. Selon les dernières statistiques, 70 % de la population active est en chômage alors que 40 % de ceux qui s’adonnent à une activité génératrice de revenus ne peuvent prendre soin de leurs familles. 23.8 % de la population haïtienne vit dans une situation d’extrême pauvreté avec moins de cent (100) gourdes par jour. De plus, selon plusieurs économistes, le taux d’inflation est de 15 % et la production agricole nationale est quasi inexistante. Pourtant, cette situation catastrophique décrite ici n’empêche pas aux membres des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire de mener un train de vie en inadéquation avec la situation de pauvreté du pays.
LES DERNIERES NOUVELLES
[1] Source : Police Nationale d’Haïti (PNH), Commission Episcopale Nationale Justice et Paix (CE-JILAP) et Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH)