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Retour de bâton: Yon jou pou gibye yon jou pou chasè

bondye-dernier-jourSi, pour l'ancien délégué du département du Sud, Gabriel Fortuné, le président Michel Martelly est un «intrus» dans le monde orageux de la politique haïtienne, par contre, pour les lavalassiens (pas seulement d'obédience titidienne), peu réputés pour leur aptitude au respect du jeu démocratique et des principes de la bonne gouvernance économique, Sweet Micky pour avoir participé aux frasques du régime putschiste en 1991-1994 et aux manifestations rache manyòk du mouvement GNB (sans oublier ses chansons carnavalesques et ses imprécations obscènes afférentes), mérite aujourd'hui un « marquage à la culotte » pour le temps qu'il aurait à passer au pouvoir.

En bons défenseurs des règles de droit et de la Constitution, sans avoir utilisé l'arme de la négociation, ils prônent le départ anticipé de leur ennemi historique à la tête de l'éxécutif.

Alimenté par une crise politique explosive, ce retour de bâton (yon jou pou gibye yon jou pou chasè) ne profite certainement pas au pays, sommé de choisir entre deux passions: celle d'un pouvoir prisonnier d'un passé houleux-- tout au moins du passé sulfureux de son chef-- et celle des lavalassiens vindicatifs déterminés à prendre leur revanche.

Les bases sociales, politiques et idéologiques du différend Aristide-Martelly, lavalas--putschistes sont vivaces. Le slogan-épouvantail Dessalines--Pétion arme ainsi la mécanique du jeu de massacre virtuel. Ce sont les passions aveugles qui guident la grande majorité de nos hommes politiques.

Si nous faisons preuve de tant de rappels historiques, c'est que, sur la question de la personnalisation des luttes de pouvoir, le respect du mandat des élus, y compris du président, la séparation des pouvoirs, la solution de sortie de crise et l'organisation des élections, le débat nous a semblé cacophonique, manquant à la fois de sérénité et de justesse. Comme s'il n'y avait de choix qu'entre davantage d'instabilité et davantage d'extrémisme , qu'entre très peu de vivre-ensemble et beaucoup d'hostilités déchirantes.

Prise en otage entre les jusqu'au-boutistes, Haïti, comme en 1991 et en 2004, est donc confrontée à un tournant périlleux. Est-il déjà trop tard pour choisir entre la voie du compromis, fruit du refus de la tabula rasa, ou bien une cassure fracassante de l'ordre constitutionnel qui aggrave la nature sociale des problèmes économiques et institutionnels?

Pierre-Raymond Dumas
Source: Le Nouvelliste
Caricature: Teddy

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