Tout Haiti

Le Trait d'Union Entre Les Haitiens

Analyses & Opinions

Carnaval dans tous les coins et recoins d’Haïti: mauvais départ pour Jovenel Moise

carnaval fatra kerlens 2017

« Durant la période carnavalesque, toute bouffonnerie est bonne. Haïti s’engouffre dans la bouffonnerie depuis plus de 30 ans. Â»

 Définitivement en Haïti nous vivons à l’ère du vide. Je me demande assez souvent où sont passés les experts et les professionnels de haut calibre en sciences humaines et sociales qui sont Haïtiens à part entière. Pourquoi n’interviennent-ils pas sur les faits sociaux pour essayer de les expliquer, les appréhender et porter le peuple à changer de comportement ? Quelle est l’utilité des intellectuels haïtiens face à la déchéance que connait le pays actuellement ? Pourquoi sommes-nous incapables de mettre sur pied des associations de professionnels pouvant réfléchir sur le mal haïtien et porter les correctifs nécessaires ? Sommes-nous condamnés à nous autodétruire et vivre dans l’aberration ? Enfin, quand est-ce Haïti sortira de l’ornière du marasme par une action agissante de ses fils et filles ? Deux semaines avant son investiture, Jovenel Moise a donné le ton dans la ville des Cayes sur cette affaire de bamboche populaire qu'est le Carnaval. Il a donné le signal qu’il ne va pas découdre avec la tradition implantée par Michel Joseph Martelly qui a organisé plus de trois carnavals par an dans le pays durant son quinquennat. Cette histoire de carnaval dans tous les coins et recoins du pays est un scandale. L'Haïtien qui fut un rude travailleur dans le temps est devenu un bambocheur à temps plein. C’est ainsi que les politiques conçoivent le développement. Après l’annonce de Jovenel Moise sur la tenue du carnaval national dans la ville des Cayes plusieurs mairies ont enchaîné pour annoncer la tenue de festivités carnavalesques dans leur commune. Est-ce que le carnaval devrait être une priorité pour le pouvoir de Jovenel Moise en ce temps de chien ?

Les rues des grandes villes principalement Port-au-Prince sont jonchées de fatras, de matières fécales et les maires n’arrivent pas à assainir l’espace public pour le rendre vivable, et puis aujourd’hui, ils donnent la priorité au carnaval. Je suis d’avis que le carnaval rentre dans la tradition populaire et qu’on ne peut pas l’annuler. Mais, si les responsables avaient un minimum de bon sens, ils auraient pensé à des festivités moins pompeuses et utiliser les fonds des deniers publics à d’autres fins plus utiles. Au moment où nous écrivons ces lignes, des employés de certains hôpitaux sont en grève à cause de manque de ressources et des conditions exécrables dans lesquelles ils évoluent. Pourquoi le pouvoir en place au nom du bon sens ne peut-il pas prendre une mesure impopulaire, mais bienveillante de limiter sa contribution à ces festivités et laisser le secteur privé et les mairies amortir les coûts et les dépenses ? L’Honorable Jean Marie Salomon a pris son courage à deux mains pour dénoncer le non-sens. Il a déclaré que la ville des Cayes n’était pas prête à accueillir un carnaval national et qu’il y a d’autres priorités et besoins pressants à satisfaire. Nous savons qu’en 2012, les bandits légaux au pouvoir avaient profité de la tenue du carnaval pour transporter des kilos de cocaïne de la côte Sud à Port-au-Prince. Quelques jours de cela, les autorités colombiennes ont saisi des centaines de kilos de cocaïne dans un yatch qui mettait le cap sur le département du Sud d’Haïti. Qui ne savent pas que les protaganistes qui tiennent mordicus à organiser le carnaval national dans la métropole du Sud sont impliqués dans le trafic des stupéfiants et le blanchiment d’argent ? Cette affaire de carnaval national est une vaste opération pour trafiquer de la drogue et blanchir de l’argent.

 La priorité de l’heure devrait bien-être le nettoyage des villes, le choix d’un premier ministre, la mise en place d’un gouvernement et la reconstruction du tissu social. Nos politiques devraient être en train de réfléchir sur comment faire pour redonner à notre pays une belle image, reconstruire notre crédit international et financer nos investissements publics sainement. C’est là que nous devrions être. J’avais eu la chance quelques mois de cela de participer à un appel conférence où le maire de Port-au-Prince, Youri Chevry parlait de sa vision et de ses priorités pour la zone métropolitaine. Il veut redorer le blason de la capitale d’Haïti. Je suis d’avis qu’il est de bonne foi. Mais, je dois dire au maire de prendre du recul pour réfléchir à tête reposée sur sa gestion de la mairie. Il doit savoir qu’il est en guerre avec le pouvoir en place qui ne le voit pas d’un bon Å“il. Il doit savoir que Port-au-Prince est la porte d’entrée du pays. Il doit savoir que les gens sont dégoutés face à la puanteur de la ville. Il doit savoir qu’il est appelé à refaire l’image de la ville. Il a pris l’engagement de redonner à la ville son image d’antan, qu’il se mette au travail. Je l’encourage à organiser un carnaval avec un budget réduit et d’utiliser les ressources déjà précaires de la mairie à des fins plus utiles comme l’assainissement de la ville. L’organisation de festivités carnavalesques dans tous les coins et les recoins de la république est un mauvais départ pour l’administration en place. Après tout, ne sont-ils pas des bambocheurs néo-duvaliéristes, adeptes de la théorie des 3 B (Bouillon, Bamboche, Bâton) de François Duvalier ? L’inculpé Jovenel Moise ne fera pas long feu s’il croit qu’il va diriger le pays comme une bande mardi-gras comme l’a fait son mentor et maitre Michel Joseph Martelly. La majorité silencieuse devrait dire son mot sur ce scandale. Où sont passés les Haïtiens pourvu de bon sens ? Où sont les potentats de la société civile ? Hélas, le pays se meurt à petits feux dans l’indifférence générale. Ville puante, peuple affamé, bamboche matin, midi et soir, est-ce que ça dérange ? Au royaume des bandits légaux, toute bouffonnerie est bonne. Bonne chance à Jovenel Moise, le roi des bouffons !

Kerlens Tilus 02/17/2017
Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.