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Au-delà de Charlot Jacquelin, Yves Lafortune répond à Pascal Adrien

Charlot Jacquelin

Cher Pascal ADRIEN !

Je viens de lire pour la dixième fois consécutive ton texte... Un beau texte ! Vraiment un très beau texte !  (Voir ici Pascal Adrien et la mémoire de Charlot Jacquelin) Je parle de la lettre adressée à ton ami Jacquelin CHARLOT Junior en ce dimanche 23 Juillet 2017. Dans ma quête permanente, j’ai voulu tenter une onzième lecture c’est-à-dire, bien lire (sans faille ni fly) comme pour me donner la certitude d’une compréhension totale parce que je suis triplement interpellé.

En un premier temps, parce que tu cites nommément mon nom aux cotés de quelques jeunes très dynamiques qui essaient chaque jour de faire la différence par-delà ce que Jacques Stephen Alexis appellerait leur compétence et tout leur sens de l’excellence. Sur ce dit, je salue Thomas LALIME, Claude JOSEPH, Etzer EMILE, Euvrard ST AMAND , Ralp JEAN BAPTISTE, Riphard SERRENT, John Herrick DESSOURCES, Jolette JOSEPH, Naed JASMIN … pour ce grand rêve commun porté à bout les bras mais qui devient chaque jour de plus en plus obèse dans leurs mains faute de vide ou faute de mieux.

Je suis interpellé deuxièmement parce que ça fait longtemps que je n’ai pas lu un texte pareil où des points aussi brûlants de la société ont été touchés dans toute leur acuité par un jeune. Non que la jeunesse toute entière n’envoie des signaux plutôt intéressants mais parce que le discours aujourd’hui arpente dans une large mesure, un individualisme qui occulte trop souvent le collectif qui devrait nous préoccuper et qui de fait me préoccupe jusque dans mes os. Le sens de cette deuxième interpellation est pour te dire que la vie a changé et la survie nous guette avec une trop grande proximité qui fait que nos jeunes frères et sœurs perdent leur repère car «le ou la» façon, ils doivent sauver leur peau. Dans cette deuxième interpellation, je mets pour toi en exergue l’évidence de la sémiologie de cette publicité qui nous indique que Ti Malice a laissé les bancs de l’école pour devenir un beurrier ! (ti malis kite lekol lal van n bè)

Dans ta lettre à l’Ami, tu parles d’une imposture au nom de tous ceux qui sont tombés au cours de la lutte, de ces nouveaux nantis comme tu les appelles ‘’ces abolochos ‘’ de l’après 1986 qui ont constitué fortune au nom d’une cause qui n’était pas la leur et qu’ils n’ont pas su ou pu porter. 1986 à 2016, trente ans de vide où les abolochos de tout acabit avaient tous une facture pour Haïti et qu’elle a dû payer très cher !

Avant de fermer cette parenthèse, je voudrais attirer ton attention sur le fait qu’aujourd’hui, les abolochos dont tu parles sont aussi des jeunes qui, en fonction du Repartimientos qui sévit dans le pays pratiquent ce que Jetry DUMONT appelle le jeunisme (Jeune qui sans consentir d’efforts, sans qualification s’infiltre dans toutes les fonctions dans l’Administration Publique comme un ayant droit). Les abolochos, ce sont aussi ces hommes et femmes d’un âge certain qui essaient de rattraper la vie en vain.

Cher Pascal ! Dis-moi combien de jeunes aujourd’hui qui réfléchissent sur une problématique de la Culture (A ce propos, il est raconté dans la ville que le Ministère de la Culture a été confié à un ex sénateur en guise de retour d’ascenseur pour ses investissements dans la dernière campagne électorale). Combien de jeunes hommes ou de jeunes femmes aujourd’hui qui réfléchissent sur une problématique de la santé ? de l’Education, de l’agriculture ?

Pour l’agriculture, je sais que nous vivons une grande confusion entre l’agro business de la feuille de route du Ministère de l’Agriculture des Ressources Naturelles et du Développement Rural et l’agriculture telle qu’elle est conduite par la seule politique publique vivante et à la mode appelée caravane. Combien de jeunes hommes ou de jeunes femmes aujourd’hui qui réfléchissent sur une problématique de l’environnement ? ( Nou toutouni nous dit Barikad Crew !)

Enfin cher Pascal ADRIEN,

Ton texte m’interpelle une troisième fois parce que je sais que comme jeune leader tu es en quête de changement. Pour ce, je t’invite à te joindre à moi pour dire à nos jeunes amis que la construction du pays passe par leur citoyenneté de sorte qu’ils soient à même d’offrir de meilleurs perspectives au pays qui brasse depuis trop longtemps le vide. Je suis interpellé à te dire la vérité, que nous sommes en déficit de sens de l’Etat et que les politiques publiques ne peuvent pas être cernées aux fins de résultats et de changement de la vie de nos concitoyens !  

Pour finir Pascal mon petit frère adoré, je compatis à la sempiternelle douleur de notre Jacquelin CHARLOT Junior je t’invite à un acte fondateur !

Il s’agit de sortir Dessalines de la fange dans laquelle sa mémoire patauge depuis la nuit des temps. J’invite tout un chacun à cogiter ensemble pour sortir Dessalines de la boue ! Un projet intercommunal impliquant 3 municipalités : Port-au-Prince, Cite Soleil et Delmas. Un projet novateur pour redonner du lustre à la ville et témoigner de notre gratitude envers le Père fondateur. Dans la foulée, on entreprendrait la réhabilitation de certaines artères du centre-ville dont la Grand-rue, cette rue autrefois fleuron du bas de la ville. Cet acte fondateur partirait du Pont Rouge à Jérémie, du Pont Rouge à Ouanaminthe, du Pont Rouge jusque dans les Nippes. Il nous faut des actes fondateurs qui pourraient donner naissance à la route de l’esclave, celle-ci partirait de l’aéroport du cap à la Citadelle comme pour rendre hommage à Albert Mangonès qui jusqu’ici est le premier à avoir mieux appréhendé l’espace public.

Ma caravane, je t’invite à la démarrer avec moi aux Gonaïves dans les lakou Soukri, Badio et Souvnans pour qu’il y ait, comme le dirait René Philoctète, des tables chargées pour les enfants et que des quatre coins du péristyle je puisse lancer la poignée de roroli sans éteindre la chandelle!

 

Yves LAFORTUNE, MAP
Av, Designer Organisationnel

Reference:

Pascal Adrien et la mémoire de Charlot Jacquelin