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Excellence, mon oeil ! - Jours de scolarisation en baisse, jour de carnaval en hausse

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La France a délégué en Haïti cette semaine deux de ses éminents représentants: Hélène Carrère d'Encausse, écrivain, spécialiste de la Russie, académicienne, secrétaire perpétuel de l’Académie française; et M. Gabriel de Broglie, historien, académicien et chancelier de l'Institut de France. Du beau monde. Deux sommités qui trimbalent une somme d’expériences.

Dans deux conférences, l’une à la bibliothèque du ministère des Affaires étrangères jeudi, l’autre à l’Institut Français vendredi, ces deux personnalités ont abordé la place d’Haïti dans la Francophonie et l’apport de nos écrivains au monde.

Mis à part la liste de prix et distinctions récoltés à l’Académie française par les auteurs haïtiens depuis plus d’un siècle, les interventions se situaient dans l’ordre des choses connues ici. Les deux académiciens s’en sont excusés à plusieurs reprises. Mais quel art, quelle maîtrise de l’ordonnancement, de la langue et du sujet! Quel respect du public!

Pendant la conférence de Gabriel de Broglie, un Jacmélien d’adoption a fait un témoignage sur l’attirance des jeunes de cette ville pour les livres, pour la petite bibliothèque que sa femme et lui tiennent en leur domicile.

Bernard Chignard a, à un certain moment, eu des sanglots dans la voix en rappelant l’œuvre d’un autre français comme lui dans la même ville: Philippe Rossillon fondateur en 1976 du Centre Alcibiade-Pommayrac. Cette école d’excellence, Rossillon rêvait d’en ériger une dans chaque chef-lieu d’Haïti. Il n’en a pas eu le temps.

Depuis la création du Centre Alcibiade-Pommayrac, il serait difficile de faire le décompte des nouvelles bonnes écoles implantées en Haïti. Les écoles congréganistes ne se multiplient plus. La vocation s’éteint sur tous les continents. Les institutions privées, le gros morceau du système éducatif, offrent, en majorité, la qualité en option. Elle n’est ni réclamée ni attendue. L’Etat haïtien ne pense qu’aux murs, pas au contenu de l’enseignement ni aux professeurs qui le dispensent. On se demande même, depuis deux ans que chaque année nous perdons un mois de classe, si l’école a un avenir autre que d’être otage de la politique et de nourrir statistiques et slogans ?

Sur Facebook ce vendredi, une proche du Collège Roger Anglade a posté ce message qui fait sens. Il est bon que cela soit lu. « Après pressions et fortes menaces, le CRA (Collège Roger Anglade) se trouve dans la malencontreuse situation de renvoyer provisoirement la rentrée scolaire au 1er octobre, pendant que la Chine a 300 jours de classes, les USA entre 220 et 250 jours, et nous autres, nous avions 190, mais on vient de supprimer un mois de travail. Donc il ne nous reste pour le moment que 145 jours.
 
Puisque nous sommes tellement brillants et intelligents, on n’a pas besoin de plus.

 SE KONSA NOU VLE L SE KONSA NOU FE L HE HA HE HA ...

 Après on se plaindra de l’état de la nation, du manque d’éducation des Haïtiens, du manque de qualifications et de la fuite des cerveaux vers d’autres pays.

En plus, le bruit court qu'une amende, d’un million de gourdes, sera imposée aux écoles qui se permettront d’ouvrir leurs portes aux élèves, même en civil. Ceci aurait été annoncé par le directeur départemental de l'Ouest du ministère, reste à confirmer bien sûr. OUPS

  SE KONSA NOU VLE L SE KONSA NOU FE L HE HA HE HA...

Nous tremblons de peur... On ne veut pas de camps d’été, ni de camps de vacances, ni de leçons particulières... et tout ceci au nom de l'équité... Aucun enfant dans la rue avec un sac au dos... Ils doivent rester chez eux.... Zokiki ou ti sourit net al kolé pour les enfants avec peu de moyens. Téléphones et chat BBM pour les autres... Ils auront de gros pouces... Nous sommes en HAÏTI, n'est-ce pas... C’est NORMAL... »

Ce cri du cœur est sans doute intéressé, l’auteur plaide pour sa chapelle, veut faire de l’argent, diront ceux qui parlent trop vite. Dans cette affaire de rentrée des classes renvoyée et d’interdiction ministérielle de ne pas y déroger, on oublie que les seuls perdants sont les élèves.

Tous les parents paieront dix mois de scolarité même s’il y a un mois de vacances supplémentaire. Toutes les écoles nationales gratuites paieront à leurs professeurs l’intégralité de leur salaire. Les seuls perdants seront les élèves parce qu’il y a un gouvernement qui n’a pas remis ses devoirs à temps. Qui n'a pas pu, pour la deuxième année consécutive, faire ce qu’il y avait à faire.

Frantz Duval
Source: Le Nouvelliste