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Haïti : Quand une loi contre le blanchiment des capitaux et le terrorisme menace les libertés

blanchiment-argentLa loi sanctionnant le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme déjà voté par le Senat ouvrirait un certain nombre de brèches mettant en danger certains acquis républicains. Les libertés individuelles, le secret professionnel des avocats et notaires seraient menacés.

Celle proposition de loi a été déposée au parlement haïtien par le ministère de la justice à la fin du mois de juillet 2012. Le Sénat de la république l'a voté le 28 février 2013.

Le 14 mars 2013, la chambre des députés n'a pas pu faire de même à cause de l'interruption spectaculaire de la séance par le député Arnel Belizaire (qui avait envoyé valser des tables dans un accès de rage incontrôlable). Il a eu l'appui d'autres parlementaires, évoquant le risque que cette loi soit devenue un outil de persécution politique et d'atteinte aux libertés des citoyens et citoyennes.

De surcroît, il semblerait que les députés débattaient sur un texte différent de celui voté par le Sénat.

Plusieurs juristes sont alarmés par la définition que donne la proposition de loi à un acte terroriste. Entre autres, "tout acte destiné à provoquer le décès ou des blessures corporelles, psychologiques graves à une personne ou des personnes" est considéré comme du terrorisme.

Selon ce meme article, des actes qui viseraient l'intimidation ou la contrainte d'un gouvernement ou une organisation internationale à « commettre ou s'abstenir » de commettre un acte quelconque sont des actes terroristes.

L'alinéa f de l'article 3 de ce projet de loi explique qu'il s'applique également aux « professionnels du droit (notaires et avocats) et de la comptabilité lorsqu'ils assistent leur client dans la préparation ou la réalisation de transactions (...) ou lorsqu'ils agissent au nom de leur client comme intermédiaire dans toute transaction financière ou immobilière ».

Quid du climat de confiance généralement garanti par le secret professionnel entre notaires/avocats et clients ?

En fait, le chapitre 4 titré « détection du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme » en ses articles 31 et suivants fait des institutions financières et les entreprises et professions non financières des « sources de dénonciations » de l'Unité centrale de renseignements financiers (Ucref).

Un autre aspect touché concerne l'interception de communications privées, ou la surveillance des communications.

L'article 38 stipule : "aux fins de l'obtention d'indices de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme", le juge d'instruction peut dans le cadre d'une enquete, ordonner pour une durée déterminée "la surveillance de comptes bancaires et autres comptes analogues".

Il peut également ordonner "l'accès aux systèmes, réseaux et serveurs informatiques ; l'enregistrement audio ou vidéo ou la photographie d'actes et d'agissements ou de conversations ; l'interception et la saisie du courrier."

Ce texte de loi, qui fait peur, ne devrait-il pas faire l'objet d'un débat public et démocratique ? Tout en assurant la possibilité de controler les réseaux criminels, ne devrait-on pas se préoccuper du respect des libertés citoyennes déjà mises à mal dans la société haitienne ?

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