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Tèt Kale a marqué deux buts. Il inscrit son nom sur le tableau d'affichage de la discrimination contre la diaspora et en même temps sur celui des torpilleurs du football déguisés en sauveurs.

martelly-black-whiteAvant Martelly, c'était le néant?

A écouter le président Michel Joseph Martelly, on dirait qu'il n'y avait que le néant ou presque dans beaucoup de domaines avant son arrivée au pouvoir. C'est grâce à lui, à travers « Contrat d'avenir », que le pays va avoir de « vrais athlètes ». A l'avenir, on trouvera, soutient l'ex-chanteur, des footballeurs « pour faire une bonne sélection ». En quelques mots, il balaie ou tente de balayer, avec une rhétorique trempée de dédain, les efforts des Grenadiers dont les prestations face à l'Espagne, l'Italie et pendant la Gold Cup avaient provoqué une grande communion. Dans la victoire, comme dans la défaite, le pays, à la radio ou devant le petit écran, était au rendez-vous, derrière l'équipe nationale, son équipe.

Les Jean Eudes Maurice et compagnie, qui ont fait les manchettes de la presse, suscité des vocations, sont aujourd'hui, sur les lèvres du président de la République, des « nègres que le pays ne connaît pas ». Le pot est cassé, la maladresse avérée. Le caractère discriminatoire des propos de Martelly à l'égard de ces joueurs expatriés ou nés à l'étranger relevé. D'un seul « shoot », Tèt Kale a marqué deux buts. Il inscrit son nom sur le tableau d'affichage de la discrimination contre la diaspora et en même temps sur celui des torpilleurs du football déguisés en sauveurs.

Michel Joseph Martelly, du lieu de ses petites certitudes à géométrie variable, essaie de gommer des réalisations, des programmes imparfaits mais qui ont eu le mérite d'exister. L'Académie nationale de talents sportifs a existé. Elle a un rejeton, l'Ecole nationale des talents sportifs. Il y a eu un visionnaire, Evans Lescouflair, qui a lancé « l'opération 2006 » en 1996. L'objectif était de faire jouer au football dans tout le pays en vue de dénicher des talents. On en a eu, même s'ils ne sont pas des cracks comme Messi. Petit à petit, dans un environnement peu favorable, peuplé de clubs pauvres, d'un championnat d'un niveau moyen, il y a eu de petits progrès. Ici, le foot est un sacerdoce, une passion. Et plein d'aficionados sont largués par les contradictions dans les propos du président sur la sélection.

Si certains rappelleront le speech de motivation du président Michel Joseph Martelly dans les vestiaires lors du premier match des Grenadiers comptant pour les éliminatoires du Mondial de 2014, d'autres évoqueront les souvenirs d'un Martelly s'improvisant chroniqueur sportif sur le plateau de la TNH pendant le match opposant les Grenadiers aux Honduriens. L'image du président fan de foot et très impliqué n'est pas discutable. Ces temps-ci, le type d'implication suscite des interrogations. Le président Martelly, dans sa toute-puissance, semble oublier que la sélection relève strictement de la fédération.

Cela dit, l'action de ce président volontariste doit venir en accompagnement de la Fédération haïtienne de football, via le ministère des Sports, acteur, en collaboration avec toutes les fédérations, le Comité olympique haïtien, dans l'élaboration et la conduite d'une politique sportive.
Politique sportive ? Certains se tordront de rire. Est-ce que cela peut continuer ainsi ? Est-ce que les fédérations, traitées en parents pauvres, seront d'éternelles quémandeuses, obligées d'être dociles pour obtenir des sous pour que le pays puisse continuer à s'adonner au sport et bénéficier de ses retombées à l'instar de certains pays ? Ces questions lancinantes habiteront peut-être le chef de l'Etat, comme sa lubie de la première fois. C'est un souhait.

Roberson Alphonse
Source: Le Nouvelliste

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