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Haïti-Politique : La réponse de Martelly au sénat, un pas vers l’aggravation de la crise préélectorale

martelly lamothe Desras

La réponse du président Joseph Michel Martelly, faite au président du sénat, Dieusseul Simon Desras, selon laquelle il propose – si ce dernier le requiert - de l'aider à rendre l'assemblée fonctionnelle et jouer son rôle, constituerait un pas vers l'aggravation de la crise postélectorale, aux yeux de plusieurs politiques interrogés par l'agence en ligne AlterPresse.

Au mouvement patriotique de l'opposition démocratique (Mopod), l'ingénieur-agronome Jean André Victor comprend la réponse de Martelly « tout simplement [comme] un pas de plus dans l'aggravation de la crise pour ne pas avoir des élections et aboutir au chaos... [lui permettant de] pouvoir gouverner par décret ».

La proposition de Martelly de venir en aide à Desras est simplement « impensable et inacceptable », eu égard au principe de la séparation des pouvoirs.

Martelly doit « faire attention » à son interprétation de l'article 136 de la Constitution, estime Sauveur Pierre Etienne de l'Organisation du Peuple en lutte (Opl) dans des déclarations à AlterPresse.

Dans une lettre en date du 20 août 2014, le sénat encourageait le président à participer à une rencontre tripartite, incluant le pouvoir exécutif, le bureau du sénat et les partis regroupés au sein de « l'opposition démocratique et la résistance patriotique ».

Ce dialogue vise, selon la correspondance, à « trouver une prompte solution à la crise préélectorale et éviter le vide institutionnel qui se profile à l'horizon de janvier 2015 ».

La lettre de Desras et la réponse de Martelly sont des preuves que « les institutions sont défaillantes. Ce n'est pas uniquement l'Etat qui s'est effondré, mais aussi tout le lien social », critique Sauveur Pierre Etienne.

Un sénateur du groupe des 6 - qui ne souhaite pas intervenir, vu que « que le groupe des 6 n'a pas encore arrêté une position » - qualifie les « déclarations » de Martelly « d'arrogantes ».

« Président de la république et chef de l'Etat, l'initiative à laquelle je peux souscrire et contribuer, dans le cadre de la Constitution et des lois de la république, c'est de vous aider, si je suis requis, à agir en sorte que le sénat, que vous dirigez, soit fonctionnel et puisse jouer son rôle », écrit Martelly, dans une lettre datée du 22 août 2014, en s'appuyant sur l'article 136 de la Constitution.

Cet article fait du président de la république le garant de la bonne marche des institutions.

Mais, tout ce qui semble préoccuper Martelly serait les amendements à la loi électorale, pour pouvoir se lancer dans des élections parlementaires et des collectivités à la fin de l'année 2014.

Après avoir rejeté en douce la proposition du sénat, Martelly se dit « toutefois disposé et disponible » pour recevoir Desras, si ce dernier souhaite « trouver une issue à l'impasse qui [l'] empêche de voter, au sénat, les amendements à la loi électorale, après plus de cent-quarante-six jours de transmission par la chambre des députés ».

Affirmant attendre toujours un cadre légal, de la part du président, pour organiser les élections, le Conseil électoral provisoire (Cep) a déjà fait savoir à l'exécutif que, dans la situation actuelle, la date du 26 octobre 2014 - claironnée sur tous les toits par l'exécutif - n'est plus envisageable.

Ces élections sont en retard depuis 2011.

« L'exécutif est déterminé à organiser les élections d'ici la fin de l'année et tous les moyens sont déjà là », fait savoir Pierre Michel Brunache, le porte-parole du premier ministre Laurent Salvador Lamothe, au cours d'une conférence de presse, ce lundi 25 août 2014 au bureau du chef du gouvernement.

Après avoir laissé écouler plus de 2 années sans prendre de dispositions adéquates à l'organisation de ces scrutins, l'exécutif se dit aujourd'hui déterminé à « mener un combat pour faire respecter l'échéance démocratique », laquelle est déjà négligée.

Encore une fois, Michel Brunache accuse particulièrement les six sénateurs, opposés à des actions entreprises par le gouvernement.

« Le problème au niveau du sénat est interne à l'institution. Six (6) sénateurs empêchent les 14 autres d'avancer », estime-t-il.

Les sénateurs, dits de l'opposition, demandent, entre autres revendications, la formation d'un Conseil électoral provisoire (Cep) avec la participation des représentants d'organisations sociales, suivant le voeu de l'article 289 de la Constitution.

Pour l'instant, le conseil est formé avec des personnalités représentant uniquement les 3 pouvoirs de l'État.

Aussi, rejettent-ils l'accord d'El Rancho, signé le 14 mars 2014 entre l'exécutif, des partis politiques et le législatif.

Le gouvernement entendrait unilatéralement inviter le Conseil électoral provisoire à appliquer l'article 12 de l'accord, donnant la liberté (en cas de constat fait par les trois parties : exécutif, prtis politiques et législatif) à l'instance électorale de mettre en veilleuse tous les articles qui pourraient faire obstacle à l'organisation des élections.

Ce qui mettrait de côté tout simplement les prérogatives du parlement.

Dans ce contexte, des sénateurs, proches de l'exécutif, prévoient de démissionner, en vue de diminuer la force du parlement et de faciliter la tâche à l'équipe au pouvoir.

Source: Alterpresse