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Accord El Rancho: « La bénédiction du mal » ou la mis en veilleuse la Constitution de 1987

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La peur de six sénateurs de la République aura porté les participants à l'Accord de l'Eglise Catholique, s'ils arrivent à s'imposer, de mettre en veilleuse la Constitution de 1987 amendée, de rendre caduc le Sénat et par ricochet la Chambre des députés, renvoyant aux calendes grecques le vote de lois importantes pour la bonne marche de l'Etat : principalement celui déjà très en retard du Budget de la République pour l'année fiscale 2013-2014 (non encore resoumis au parlement), celui bientôt pour l'année fiscale 2014-2015 devant être soumis en juin 2014, l'ajout de ressources financières dans le budget 2013-2014 pour l'ajustement des salaires de professeurs appauvris dont on avait promis la régularisation de paiements arriérés dans un maximum de 3 mois en janvier dernier et finalement tous Projets ou Propositions de Lois faisant la navette entre les deux chambres et les projets de Loi fraîchement soumis au parlement pour les suites nécessaires.

Par ailleurs, cet Accord introduit un article dénué de sens et de toute logique qui est l'article 11 concernant les amendements, lisez :

Article 11 : Amendement

« Les parties s'engagent à faire amender la constitution conformément à la procédure et dans le délai imparti par la Constitution elle-même. A cette fin, il est créé une Commission spéciale ci-après Commission de Suivi des Accords, composée de représentants de l'Exécutif, du Parlement (?) et des Partis politiques. »

Il parait que ces « parties » ne se sont jamais données la peine de lire la section qui traite des amendements dans la Constitution de 1987 amendée ou pas, concernant la procédure, le vote qualifié requis et le délai imparti. Avec des élections projetées pour fin octobre 2014, la fin de la dernière session ordinaire de cette Législature arrive le 8 septembre 2014 et un Sénat de 20 membres depuis mai 2012, par quel miracle « la Commission spéciale ci-après Commission de Suivi des Accords » va-t-elle trouvé la majorité de 2/3 au sénat qui est 20, mais réduit obligatoirement à 19 pour le vote car le président du sénat ne vote pas quand bien même ce serait un vote à l'unanimité des 19, pour déclarer qu'il y a lieu d'amender la constitution. Ces « parties », semble-t-il, n'ont rien appris de l'échec cuisant de Martelly quand il voulait imposer à tout prix un Conseil Electoral Permanent «pèpè» quand les conditions requises n'étaient pas réunies. Ces mêmes exigences sont requises pour pouvoir déclarer qu'il y a lieu d'amender la Constitution. Y aurait-il un plan caché pour sauter les verrous qu'impose la Constitution pour être amendée ? Il semble qu'il y aurait anguille sous roche ! Pourquoi inclure dans un Accord un article constitutionnellement inapplicable ?

Comment des négociateurs peuvent-ils agir avec tant de légèreté sans ne pas anticiper les graves conséquences qui vont en découler ? Si le Sénat fonctionne avec 20 sénateurs, à qui revient la faute ? On se rappelle le vote négatif de 3 sénateurs sur 20 qui a épargné d'un vote de censure respectivement le ministre de l'Intérieur, celui de 4 sénateurs sur 20 le ministre de la Justice et celui de 5 sénateurs sur 20 le titulaire des Affaires Étrangères. Après ce vote, on n'avait pas vu Lucien Jura, ni Kedlair Augustin venir dénoncer le fait que des ministres recevaient « un vote de confiance » respectivement avec 3, 4 et 5 votes de sénateurs sur 20. Tous ces trois (3) ministres sont encore en fonction, n'ayant pas eu assez de décences pour remettre leurs démissions après ce vote avilissant d'une grande majorité des sénateurs (plus que 2/3 des sénateurs en fonction) et très certainement dans le «chaka» qu'on prépare il seront reconduits à cause de leur servilité.

Le sénat réduit à 20 sénateurs convenait bien à l'Exécutif jusqu'avant la mise en place de ces pourparlers et aucun des signataires de l'accord de « El Rancho » n'avait jamais dénoncé cette irrégularité. Le gouvernement s'en réjouissait en prolongeant au maximum cette situation se sentant à l'abri de tout vote de censure, ce qui a permis au premier ministre Lamothe de devenir plus arrogant et de bouder toutes les invitations des Commissions du Sénat. Lundi 17 mars 2014 il a encore récidivé méprisant une autre invitation de la Commission Finances du Sénat présidée par le sénateur Privert sur l'usage abusif et irresponsable des Fonds de Petrocaribe par son gouvernement. La crainte d'un délai sur le vote pour amender l'actuelle Loi électorale et l'impossibilité anticipée d'éliminer certains articles, plus précisément l'article 57.1 interdisant la participation des agents intérimaires aux prochaines élections, tous des partisans zélés du pouvoir, ont fait paniquer la hiérarchie catholique et l'Exécutif (des frères jumeaux) et pour sauver l'honneur d'un Cardinal on a préféré commettre parjure si toutefois on arrive à imposer au parlement et à d'importants partis politiques cette violation flagrante de la Loi Mère. La loi est dure, mais c'est la loi et il faut la respecter même quand elle ne peut pas servir certains intérêts mesquins. Un Cardinal n'est pas au-dessus des lois de la République et non plus infaillible. On n'a qu'à prendre en exemple le Cardinal de Saint Domingue pour se rendre compte de combien la fonction de Cardinal a été réduite à sa plus simple expression dans une église déjà en perte de popularité depuis plusieurs décennies.

Cet indécent « Accord » ne va que polariser davantage la société haïtienne, suivez mon regard. C'était là quelques considérations autour de l'Accord de « El Rancho », véritable bénédiction du mal. Shalom.

Dieudonne Saincy. DS
(Journaliste, polémiste)

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